Origine et temps de séjour des eaux sur bassin versant amont de la Moselle a partir des
isotopes stables (dD et d18O)
A. Brenot (1), M. Benoît (2), J. Carignan (1) et C. France-Lanord (1)
(1) Centre de Recherches Pétrographiques et Géochimiques, 15 rue Notre Dame des Pauvres,
54501 Vandoeuvre-lès-Nancy
(2) INRA, Station S.A.D. , BP35, 88500 Mirecourt
L’eau d’origine météorique, constituant la source primaire des eaux de la rivière Moselle, circule à travers différentes lithologies et interagit avec celles-ci de telle façon que sa composition chimique et isotopique change avant d’être collectée par le lit majeur de la rivière. À l’échelle d’un bassin versant la composition isotopique en dD (D/H) et d18O (18O/16O) des eaux de pluie varie cycliquement avec les saisons (Dever et al., 1990). L’enregistrement éventuel de ces fluctuations dans des eaux de différentes origines (sols, nappes, rivières) sur le bassin versant amont de la rivière Moselle permet d’appréhender les questions de temps de séjour des eaux dans les sols, de mélange de masses d’eau et de comprendre ainsi son alimentation.
La comparaison de deux techniques de prélèvement d’eau de sols sur une parcelle agricole expérimentale de l’INRA (par bougies poreuses et par drainage) met en évidence des temps de résidence variables de l’eau dans le sol ainsi que des phénomènes d’évaporation et de transpiration. Les différences de composition isotopique dD et d18O des eaux observées entre les deux techniques montrent des mouvements particuliers de l’eau dans le sol : (1) une percolation lente des eaux jusqu’aux bougies poreuses : ces eaux ont une composition isotopique homogène, elles ont le temps de se mélanger (2) un flux rapide de l’eau vers les drains selon des zones de circulation privilégiée (fissures) : la composition isotopique des eaux collectées reflète alors directement celle des eaux de pluie.
Dans les eaux de nappe prélevées sur le secteur on ne retrouve pas les variations saisonnières en dD et d18O des eaux de pluie. La signature isotopique des eaux souterraines est proche de celle des eaux de sols prélevées par bougies poreuses, ce résultat est cohérent avec une alimentation de la nappe par l’infiltration lente de l’eau météorique dans les sols.
Les compositions isotopiques en Sr (88Sr/87Sr) et en sulfates (d34Ssulfate et d18Osulfate) dissous dans les eaux de la Moselle et de ses principaux affluents, complètent les informations fournies par les isotopes de l’eau dD et d18O et permettent d’identifier l’origine de l’eau (météorique, eau de nappe, eau de drainage de surfaces agricoles…) et des éléments dissous (naturelle et anthropique) de la Moselle. Cette analyse multi-isotopique montre que les origines de l’eau de la Moselle diffèrent en fonction du régime hydrique de la rivière et permet de proposer une quantification du mélange des masses d’eau de différentes origines en fonction des saisons.