Acquisition du terroir Marennes-Oléron par l’huître creuse Crassostrea gigas pour différentes conditions de culture : approche par les isotopes stables
N. Malet
Centre de Recherche sur les Ecosystèmes Marins et Aquacoles (CREMA, UMR 10 CNRS-IFREMER),
Place du séminaire, BP 5 17137 L’Houmeau
Le bassin de Marennes-Oléron abrite des activités ostréicoles d’importance économique de tout premier plan. Elles s’appuient sur des pratiques d’élevage diversifiées basées sur l’exploitation extensive d’une mosaïque d’habitats hydrosédimentaires. Ainsi, selon leur localisation géographique et leur mode de culture, les huîtres en élevage disposent et ont accès à différentes sources de nourriture : phytoplancton estuarien, phytoplancton néritique, matière détritique, microphytobenthos. Il apparaît qu’une avancée décisive dans l’état des connaissances sur les déterminants géographiques de la «qualité d’une huître commerciale» passe par une analyse détaillée des transferts trophiques in situ entre types de nourriture et huîtres placées en conditions réelles d’élevage professionnel. Le traçage isotopique naturel s’est alors imposé depuis quelques années comme un outil puissant et pertinent pour l’analyse des réseaux trophiques, car la signature isotopique, caractéristique des sources trophiques utilisées, est conservée chez les consommateurs avec une certaine différence, appelée fractionnement isotopique.
L’étude présentée a pour but d’analyser le temps nécessaire, mis par des huîtres creuses Crassostrea gigas placées en conditions réelles d’élevage, à l’acquisition complète des nouvelles caractéristiques isotopiques définissant un terroir local. Des huîtres d’origine extérieure au bassin de Marennes-Oléron ont été placées soit sur estran (Banc de Perquis, élevage sur table et à plat) soit en claire ostréicole (Artouan) durant l’été 2002. Les cinétiques d’acquisition du terroir local ont été analysées en distinguant par organes les signatures des isotopes stables du carbone et de l’azote. Des indicateurs hydrobiologiques, tels que la charge en matière organique, la chlorophylle a (en abrégé chl a ) ainsi que les rapports C/N et C/chl a, ont permis de préciser la qualité et les variations saisonnières des sources nutritives disponibles pour les huîtres.
Les résultats montrent des différences significatives de signatures isotopiques entre les organes ainsi qu’au niveau des temps d’intégration de la nouvelle signature isotopique. De plus, les résultats suggèrent des compositions isotopiques distinctes entre les trois conditions de cultures confirmant que la composition isotopique des sources de matière organique et l’activité métabolique des huîtres sont différentes en chacun des sites.